“Psychopathologie du mysticisme et travail du négatif” – Jacques ARÈNES

Adolescence2008/1 (T. 26 n°1)

Les modèles traditionnels de la psychopathologie mystique

Les mystiques sont diverses, et il est présomptueux de discerner une pathologie du mysticisme comme de donner une unité au mouvement mystique. L’unité de la mystique est cette dimension essentielle du religieux qui déploie l’amour et le désir humains en désir et amour religieux . Il s’agit donc d’évaluer l’érotique de la religion et ses dérives pathologiques, dans une perspective où l’objet divin présent/absent se dérobe sans cesse.

Cette érotique du religieux n’est pas identique à elle-même au cours de l’histoire ; la question se pose donc de sa spécificité en une culture postmoderne où la religion elle-même devient un objet présent/absent. En d’autres termes, en notre époque d’effacement de l’objet religieux, la tâche de la subjectivation croyante, même dans le cadre de l’érotique mystique, se doit de fonctionner en regard de forces de déliaison importantes.

Avant d’interroger la psychopathologie mystique, explicitons cette notion. Dans ces « pathologies » religieuses, le sujet s’empare de significations religieuses pour les mettre au service de « substitutions fonctionnelles de significations inconscientes ». Les représentations religieuses y perdent alors leur « pouvoir intentionnel et anticipatif ». Mais, cette obscurité constituante n’est-elle pas le fait de la vie psychique de tout sujet, croyant ou non, névrosé ou non ? La démarche religieuse ne deviendrait alors réellement « pathologique » que dans la mesure où elle fonctionnerait comme instrument d’une automutilation. « La psychopathologie religieuse est une automutilation religieuse qui s’appuie sur une automutilation psychologique et qui, à son tour, donne à celle-ci sa motivation ». Tout en gardant à l’esprit le postulat psychanalytique que les névroses sont inscrites dans la destinée de l’homme, et que la frontière du pathologique s’avère purement formelle. Les aléas du désir mystique ne peuvent être, pour un sujet donné, clivés d’une manière définitive entre expression masquée et morbide du refoulé d’une part, et processus sublimatoires d’autre part… [PDF]

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